Cet ouvrage veut faire entendre les voix qui se sont exprimées lors de la Révolution tunisienne. Il restitue la parole qui a occupé l'espace public, la conversation et la bienveillance qui ont circulé entre les citoyens, le bien commun qui les a réunis.
Il s'attache ensuite à comprendre les enjeux soulevés par la transition politique. Les uns ont transformé l'islam en une biopolitique visant le contrôle de la population. Les autres ne sont parvenus ni à ré-enchanter la société ni à proposer de nouveaux modes de se gouverner.
Plusieurs catégories de la population, notamment les jeunes, les pauvres et les artistes, sans oublier la forte mobilisation des femmes de toutes conditions, se sont montrées plus créatives. Leurs revendications ont renoué avec l'exigence d'autonomie, à l'origine du soulèvement de la multitude.
Pour démêler cette histoire en train de se faire, l'auteur a porté sa vue sur les citoyens ordinaires. C'est en rapportant les expériences individuelles, que l'on raconte en même temps l'histoire du présente, et peut-être l'histoire à venir.
Avant-propos
Pourquoi ce livre ?
1. La servitude volontaire ou comment s’exproprier de soi-même
L’acquiescement à la dictature
Donner sa propre voix à la société
Le déficit de citoyenneté ou l’absence à soi
2. « Dégage » ou comment s’appartenir à nouveau
Les faux-semblants de la dictature
L’émergence d’un nouveau lien social
Une nouvelle solidarité se crée
Une nouvelle image de soi
Une nouvelle éducation sentimentale à l’être-ensemble
3. « Le peuple veut la chute du régime » ou le recouvrement de la capacité d’action
La constitution de la multitude
Nous sommes tous des pauvres
La multitude fait basculer l’histoire
Révolution et cyberdissidence
Une « Révolution du Facebook ? »
« Ben Ali, dégage » ou la fuite du dictateur
La révolution ou le sentiment de bonheur !
La révolution vue d’ailleurs
De quoi l’Arabe est-il le nom ?
Une « Révolution du jasmin ? »
4. « Nous sommes tous avec toi, Bouazizi » ou la fin de la raison sacrificielle
Naissance d’une icône
Une figure héroïque contestée
Logique d’un suicide par le feu
La fin de la raison sacrificielle ?
5. « La Tunisie est un peuple non un gouvernement » ou la puissance de la multitude
La multitude comme sujet de l’histoire
Une nouvelle perspective sur la multitude
De quoi la multitude est-elle le nom ?
La multitude ou la dignité du politique
Multitude et nouvelles formes d’action
6. Le pouvoir contre la multitude ou la division de la société
Les islamistes : un danger pour la société ?
L’Union Générale Tunisienne du Travail : une force de médiation pour la société ?
L’État : une force de régulation ?
Les Bourguibistes : des contre-révolutionnaires ?
Les modernistes : des démocrates ?
Deux Tunisie s’affrontent
Une logique binaire en action
7. Le pouvoir contre la multitude ou la captation de la puissance
La délégitimation des revendications populaires
L’indignité comme moteur de la révolte
L’élite et la récupération de la puissance du peuple
Quand « Dégage » devient un impératif négatif
La multitude ne désarme pas
Les gouvernants ne sont pas « à la hauteur de la jeunesse »
Des hommes politiques surgis du passé
Les fausses idées sur la religion et l’identité
Les nouvelles ritualités du politique
Le nouveau théâtre du pouvoir
8. Le pouvoir comme rythme. Autonomie ou sacralité de la société ?
Deux temporalités concurrentes : Communauté des croyants ou État des citoyens ?
Une illustration : la controverse autour de l’hymne et du drapeau national
Oumma, califat, Charia : la transcendance religieuse, au fondement du politique ?
Commémorations républicaines et État civil
Des funérailles nationales ou une nouvelle sacralité laïque
Le souverainisme d’État ne suffit pas à fonder la légitimité révolutionnaire
Les institutions de transition et la gestion des conflits
Ni la démocratie, ni les « droits de l’homme » n’existent à l’état de nature
9. Le pouvoir comme enjeu constitutionnel
Le projet constitutionnel islamiste : entre charia et État civil
Les projets civils de la Constitution
Quelques instantanés du débat électoral
Une journée de campagne électorale
Quelques grandes messes politiques de la Tunisie postrévolutionnaire
De l’anathème en politique
La dernière ligne avant les élections
Le triomphe islamiste à la Constituante
La réaction affolée des modernistes
Intermède. La Révolution sur la pente du désenchantement
Les Zwewla (les pauvres) sont abandonnés à eux-mêmes
Une Assemblée constituante qui traîne ses travaux
Une classe politique défaillante
L’enjeu central du biopolitique
10. La femme comme enjeu de contrôle
Le surgissement sur la scène des salafistes
Des niqabs à l’assaut de la « laïcité » : l’affaire de La Manouba
Une ambiance inquisitoriale contre la mixité et les enseignant(e)s « mécréants »
Le voile : signe de soumission ou d’émancipation ?
Pour sortir du schéma féministe faussement universaliste
Le mariage coutumier (orfi) ou le retour par la bande de la polygamie
Qu’y a-t-il derrière la complémentarité entre hommes et femmes ?
Une conception naturaliste des rapports sociaux de sexe
Les faux-semblants du féminisme d’État
La participation des femmes à la vie politique : Tunisiens encore un effort !
La violence structurelle faite aux femmes
La mobilisation contre le viol ou l’émergence d’un nouveau féminisme
L’indignité associée au viol est devenue une exigence universelle
Le corps de la femme comme outil de combat
De quoi la nudité est-elle le nom ? Féminisme des petits pas et féminisme radical
Voilées ou dévoilées ? Pour en finir avec le féminisme paternaliste
11. Le sacré contre l’art ou l’offensive contre la société civile
L’atteinte au sacré : mot d’ordre des islamistes
Persépolis ou l’offensive généralisée contre l’art
Les islamistes ne sont pas d’irréductibles fanatiques ignorants
La société est mûre pour entendre tous les discours, y compris les plus critiques
Les attaques tous azimuts contre les artistes et les intellectuels
L’exposition de peinture d’El Abdellia : art ou sacrilège ?
Street art et danse : l’investissement de l’espace urbain
Rap et hip-hop : un espace de contestation
Il ne s’agit pas de parler au nom des autres, mais de revendiquer sa propre voix
La criminalisation de l’atteinte au sacré
12. L’« islam » comme gouvernement des corps ou comment les Tunisiens ont peur pour la société
L’« éveil islamique » ou l’investissement des corps
Un comité pour la répression du vice et la promotion de la vertu
Une collusion d’Ennahdha avec les salafistes ?
Un quadrillage serré de la société
L’assujettissement du corps de la femme : du voile à l’excision en passant par le mariage sexuel
La campagne contre l’athéisme
Les islamistes et la peine capitale
Les islamistes et l’homosexualité
L’enjeu autour de la destruction des mausolées de saints
Le sens de la rage iconoclaste ou le triomphe du wahhabisme
La Tunisie est devenue un pays de prédication islamique
Réinvestir l’Université de La Zitouna : un enjeu de taille pour les islamistes
La rationalité des croyances des islamistes
Le modèle pastoral islamiste submerge la société
Épilogue
Le piège de l’identité