Contrairement à bien des ouvrages, ce livre n’examine pas le tourisme tunisien sous le seul angle de la crise, ni sous celui de l’acharnement des intégristes à son égard, mais comme un axe central autour duquel s’articulent les rapports à l’autre et à soi dans le contexte postcolonial, et plus récemment, postrévolutionnaire. En ce sens, le tourisme en Tunisie n’est autre qu’un microcosme cristallisant les problèmes les plus complexes du pays, qui ont rendu inévitable le déclenchement de la Révolution à ce moment bien précis de l’histoire : disparités régionales et économiques entre les régions côtières et l’arrière-pays, phénomène d’exode rural et désillusion des jeunes Tunisiens subissant les conséquences de ces disparités, représentations illusoires de la modernité au travers du « façadisme » côtier, ambivalence identitaire entre l’Orient et l’Occident, rapports problématiques avec le passé, la religion et le patrimoine, image réductrice et trompeuse qui fait l’éloge d’un beau pays, stable et paisible, tout en dissimulant la réalité amère d’une société bâillonnée, frustrée et dépressive.
PRÉFACE
PROLOGUE. Ce que s’indigner veut dire
1. De l’indépendance à la Révolution: aller-retour entre deux temps
Bourguiba : récit d’une bataille inachevée
Des fondements de la politique de modernisation
2. La naissance d’un paradis : généalogie d’un État hôtellisé
« Je bâtis donc je suis » : l’hôtel, l’homme et l’État
Le pouvoir de montrer et de se montrer
Palaces et fortifications apothéotiques du pouvoir
Mimétisme, ressemblance et dissemblance : le sens d’une ouverture
3. De quoi le tourisme balnéaire est-il le nom ?
Le ruban côtier et ses dents de peigne
Hôteliers et affairistes : la poule aux oeufs d’or
L’autre revers de la médaille : hospitalité et maison familiale
La terre des femmes et la peur des hommes
4. Corps éclatés/corps effacés : gloire et déboire des double damnés de la terre et de la mer
Des villes vedettes ou comment mesurer la modernisation
La Tunisie de la mer versus la Tunisie de la terre
Auto-séduction et migrations touristiques Les trois corps du serveur
5. Images-cellophanes et identité express : le patrimoine à table
Le changement ou l’oracle d’une réconciliation avec soi
Sécurité, paix et douceur : les dessous d’une image touristique « nouvelle »
Dissonance et dissidence : les encensements de l’image-temps
Les trois recettes du Chef : monuments, yaourts et spaghettis
La Nouba : Carthage, le palais et sa cour
La danse du « voile qui dévoile »
6. Défis et enjeux de l’après-Révolution : l’hôtel ou la mosquée ?
La prière ou la danse ?
À la redécouverte du pays : caravanes et marches de libération
La caravane de remerciement : horizons et limites d’un mea culpa
Exotisme de la misère et idéalisation de l’Autre de soi
Mosquées de sable et prières balnéaires
Luttes et résis-danses de la société civile
ÉPILOGUE. La facture du non-tourisme ou comment sauver le soldat « Espoir » ?